vendredi, mars 17, 2006

une journée de Stanley White

Zina au Falstaff, c'est le nom de la serveuse qui a du manger un cendrier tout cru dans un passé récent pour avoir cette voix si éraillée, la fille qui un jour nous avait couru après parce qu'elle était persuadée que nous étions partis sans payer quelques verres, elle avait sans doute raison mais c'était la faute de l'alcool, alors bon, on va dire que l’incident est clos. Zina qui sourie, âprement mais qui sait pourtant se rendre indispensable.

Je continue le bouquin de Alain Pacadis, avec son enthousiasme à l'emporte pièce mais d'une franchise absolue sur « sa » scène punk française. Aucun calcul là dedans, pas de recul non plus même s'il essaye de deviner à quoi ressemblera l’année suivante la new wave. A ce petit jeu de marc de café, il faut bien avouer que ce bougre là ne s’était pas trop trompé. Drôle de bête que ce gars là. Pas de meufs non plus dans ce bouquin mais je crois savoir pourquoi.

Malade comme un chien sur le chemin du retour. Je vomis carrément dès que le train se met en marche. Comble de malchance je ne suis pas seul dans le wagon. Très digne, je me lève, enjambe la flaque de mon vomi et vais voir ailleurs si ça pue moins. Le journal que je lisais est, quant à lui, mort de sa belle mort (comme Jimi en somme).

Qu'est ce que j'ai bu ? Presque rien si on y pense bien ! 2 verres de vin blanc, 1 verre de moelleux chez Tom, 2 cognacs, un pastis, une Orval, tout ça le ventre vide, et après on mange, je ne sais plus quoi, une coucroute sans doute accompagnée de bière blonde et après je ne sais plus. Quel gâchis, le magret de canard de Tom était délicieux.

Sinon, AM d’hier agréable. Déambulations sans but avec Tom, Bastilledans un premier temps , ensuite le petit bar à côté de la Tour D'Argent où l’on écoute toujours de la bonne musique, re - Bastille. Vu mon pote barcelonais El Gallo, discussions autour de Bowie, je suis légèrement éméché mais il ne m'en veut pas et fais comme de si rien n'était. On parle de son boulot, d'un obscur bassiste de 1969, la chanson ou bien l'année ? je sais plus, Mon Dieu, ces gens sont fous et moi le premier.

Tom finit par me dire qu'il n'aime pas ce que j'écris. Bravo, enfin un peu de franchise !!! ça ne m'empêche pas de filer mes trois petits scénarios à El Gallo, on verra bien ce qu'il en pense.

Plus tard. Rencontré la voisine de Tom. Avec el Gallo et Tom, on fait un raffut pas possible sur la chanson Wake up que Bowie a joué avec Arcade Fire, sur ce la voisine déboule, ouin ouin, vous faites trop de bruit, etc … Pas de problème, on l'installe bien au chaud, on lui fait boire deux, trois martinis et elle finit par nous trouver sympas. Enfin, pas moi. Elle semble quand même un peu malade. Ce soir, on doit se revoir pour la soirée organisée autour de El Gallo au Petit Monde.

En chemin, je repense à la soirée d'hier passée avec Alex. Calme et tranquille. On durait que ça ne me réussit pas. Elle s'endort dans mes bras sur Echoes de Pink Floyd que je n'avais pas réécouté depuis belle lurette et dont les paroles me semblent frôler le sommet du ridicule mais dont la musique me parle encore. Je sens Alex de plus en plus méfiante. Sur ses gardes. Bref, le week end prochain en Espagne sera un test. Encore un.

J'attends le soir tomber avec le fracas d'un énième verre de rouge sur la table de ce bar PMU de la rue de Charenton. Au fait, Ju-ju est enceinte !!!

La soirée. Quand j'arrive, elle est presque déjà finie pour moi. Inflation totale, brouillard persistant. Je me demande ce que je fous là. J'ai bien l'impression que mon pote Byron se pose la même question. On se regarde du haut de nos égos démesurés et on se dit « c'est quoi cette soirée club med de merde ? ». Mais ce n'est pas ça. Car, c'est encore une soirée, ce n'est pas eux mais nous, un soir, tous les soirs du monde et ce n'est pas encore assez.

Alors, cela ne ressemble à rien, le vin fait hurler les blessures des uns et des autres, Hélène pète les plombs, Xavier l'enfonce sans ménagement (quelle pute celui là quand il s'y met, je l'aime bien !), le patron du bar se met à boire autant que nous, au bout d'un moment, il ne reste plus une seule bouteille de vin disponible. Quelle soirée.

La déraison sans passion, obstinée mais par la bande, telle est ma vie, telle est une soirée avec mes potes.

Les yeux de chat apeuré de Anne, le mal être rampant de Hélène, les envies en cage de Gina, mon pote Joe (un anglais pure souche de Vincennes) qui me regarde en se disant « pourquoi tu m'as invité là dedans ? ».
Pendant ce temps là, El Gallo regarde encore et encore et ne dit surtout rien.

rouge sang

Cette nuit, j’ai rêvé de cette jeune fille qui ne l’est plus vraiment. Je suis vraiment content de la revoir. Cela faisait si longtemps ! A vue de nez, je dirais dix ans ou plus, disons 1994, dans une rue perpendiculaire à la Grand Rue, à deux pas de Carnot où j’ai habité par la suite.

Je lui demande ingénuement comment elle va. C’est la première question qui me passe par la tête. Et e fait, j’ai la réponse m’importe vraiment. Mais à l’instant même où je formule cette question, je me rends compte qu’elle a l’air plutôt mal en point. Ses cheveux roux sont coupés très courts et cela ne lui va pas très bien, me semble t’il. Bizarrement, ses adorables tâches de rousseur ont toutes disparues et sous ses yeux se dessinent d’affreuses traces violettes que je ne m’explique pas tout à fait.

Face à ma question ingénue, instantanée (comme les photos et la soupe), sa réponse ne tarde pas. Elle est d’ailleurs fulgurante comme un coup de poignard.

« Tu ne veux pas savoir comment je vais, alors pourquoi me poses tu cette question ? qu’est ce que tu en as à faire ? Je ne vois pas pourquoi tu me poses cette question. »

Je ne sais pas pourquoi mais j’en ai les larmes aux yeux. J’accuse le coup comme je peux en bafouillant des excuses.

Face à ma mine défaite, elle finit par sourire.

Ses yeux sont rouge sang.

samedi, mars 11, 2006

Enfin (format texte)

Enfin


Enfin, ne pas se laisser leurrer. De grâce. Soyons sérieux. Ne nous laissons pas gagner par l’illusion de ces conclusions hâtives et ô combien erronées.

Sa liberté. Sa fameuse liberté dont on nous rabat les oreilles. J’aimerais que nous en parlions, que nous la décortiquions un peu, comme une crevette à l’ail et au persil. Par acquis de conscience, bien sûr, et peut être aussi avec la secrète intention de briser son rêve.

Arrêter d’être dupe, une seconde suffira.

Avec sa liberté chérie, sa tendre et douce liberté chérie. Sa liberté que j’exècre du plus profond de mon cœur.

Sa liberté de croire ? De se tromper ? D’exister ?

Non.

Liberté, plutôt, de tomber dans son piège. Oui, liberté de se croire acteur de plusieurs drames amoureux à la fois et ne pas envisager le mot « fin » tel qu’il s’écrit vraiment.

Liberté de se fourvoyer, de faire le premier pas, vers la chute.

Evidemment dans un décor expressionniste tout prendrait son sens véritable, cette nouvelle fille là, par exemple, il ne tarderait pas à voir cette longue traînée d’ombres et de soupçons qu’elle laisse derrière elle.

Mais non, à quoi bon ? Ici et maintenant, le doute n’a pas lieu d’être.

Sa liberté qui lui suffit,
cette liberté qui se suffit à elle-même;
quitte à ne pas pouvoir s’en remettre.

Enfin (format chanson)

Enfin,
Le monde à portée de mains.
Avec,
La liberté de se laisser aller,
De ne plus rien décider,
De s’en remettre au destin.

Enfin,
Le monde à portée de mains.
Avec,
Un désir que l’on connaît trop bien,
Pouvoir enfin accéder
A ce qui ne s’appelle pas encore demain.


Enfin libre de s’asseoir,
De sombrer sans le vouloir
De partir en arrière,
De ne pas cligner des yeux aux pleins phares.

Enfin, avec le monde à portée de mains.
Le monde à portée de mains.

Enfin,
Se refuser à dire le mot « fin »,
Avec,
La liberté de ne croire en rien,
De ne pas se briser comme un jonc,
D’emprunter pour un jour des habits de marin.


Enfin libre de s’asseoir,
De sombrer sans le vouloir
De partir en arrière,
De ne pas cligner des yeux aux pleins phares.

Enfin, avec le monde à portée de mains.
Le monde à portée de mains

Mais il faut croire que ce n’est pas encore assez
Pour un homme qui osait se croire libre.

Avec le monde à portée de mains,
Le monde à portée de mains.


Pour Stef

lundi, mars 06, 2006

Musique à usage personnel : Wish you were here

Cette chanson n’a pas de fin. Elle ne débute même pas là où on le croit. Elle court le long des deux faces d’un album, à chaque écoute un peu plus longue, un peu plus poignante pour celui qui sait être absent.

Cette chanson c’est la toile du portrait de Dorian Gray encore intacte, inconnue d’un public qui ne demande qu’à crier au génie ou à brûler celui qui porte les premières stigmates.

Un jour je la crois faite de plomb légèrement cuivré, comme un cylindre qui ne servirait absolument à rien, posé sur une table de travail où jadis on s’est rêvé plus malin que les autres.

D’autres jours, je me vois parfaitement la surplomber légèrement du haut de cette Tower of Songs où les chanteurs vont sur leurs vieux jours faire don de leur dernière élégance. Je la touche presque du doigt mais c’est en vain.

Dans un coin de cette pièce, la nuit de préférence, juste au dessus du miroir vide, un petit point sur un mur plus très blanc. Elle est là. Définitivement absente.

Dans le studio d’enregistrement, les musiciens se regardent à peine. Les notes de guitare s’étirent lentement, la chanson se réveille au sein d’un groupe qui ne désire plus rien si ce n’est qu’un prétexte de ne plus être ce qu’il est devenu, rock star incongrue, bedaine cynique, rictus de flower power. Le groupe n’est plus, la musique, elle, est là. Signe de l’absence immobile.

Dans un coin de ma chambre, la nuit de préférence, juste au dessus du miroir vide, un petit point sur un mur plus très blanc. Je suis là. Définitivement absent avec comme seule compagne l’air d’un tocsin abruti par un pays qui rêve encore de victoire.

Le succès aurait pourtant du les satisfaire, combler leurs désirs les plus fous mais bien sûr cela n’a pas été le cas. Ils se retrouvent aujourd’hui avec sur les bras un album qui a fait un carton partout dans le monde et qui conclue une certaine recherche de suite musicale qui ferait sens. Pas un album véritablement embarrassant, pas non plus le compromis qu’ils n’osent pas nommer. Juste une collection de chansons qui les renvoie à ce qui leur fait cruellement défaut, cette petite étincelle que l’on nomme déjà, derrière leur dos, artiste maudit, trahi par ses anciens collègues.

Un soir, je me surprends à descendre dans le salon pour jouer du piano. Je ne sais pas en jouer mais il faut absolument que je retrouve cette mélodie qui descend les escaliers, marche après marche, pour s’arrêter sur le seuil de la porte. Je m’acharne tendrement sur ce piano qui ne m’appartient pas mais rien n’y fait. Je n’arrive à rien. Je soupire un peu puis me prépare un café. La nuit est longue, une fois de plus. Je résiste à la tentation de retourner m’abrutir sur internet. Je regarde le mur, entre les photos de Denis Lavant et de Leonard Cohen. Il y a un petit point noir, un petit trou laissé par une épingle. Je ne suis plus là.

Si je devais ouvrir la bouche pour dire ce que je ressens, si je devais taper sur le clavier ce que cette chanson m’inspire, je ne laisserai qu’une trace de buée sur la fenêtre par temps d’hiver, je ne laisserai que la trace du curseur clignotant sans relâche à la fin d’un texte qui voudrait arriver à sa fin.

Wish you were here.

Enfin 2 (inachevé)

En y pensant bien, et on ne peut pas dire que ces derniers jours il s’en privait, le soi disant vide qui l’habitait ne l’était pas, vide, je veux dire. Il était plutôt plein à craquer, en fait. Plein de causes et de conséquences à demi formulées. S’il en était là, il devait bien y avoir une raison ; une seule raison lui aurait suffi d'ailleurs , mais voilà, il pouvait en nommer des dizaines, toutes plus insignifiantes et résolues les unes que les autres.
Que ce soit l’absence, puis une autre … absence, par exemple. Ou bien encore d’autres choses comme un voyage de nuit entre Paris et Barcelone avec Sarah et un autre sans Sarah, ou alors une certaine chanson écoutée un 31 décembre. Et bien d’autres choses sans rapport apparent avec son état actuel et pourtant tellement déterminantes, agissant par la bande, comme un jumeau qui recherche sa bulle, comme un rond qui s’ignore et se rêve carré.

Cela dure depuis deux semaines déjà. Il ne sait définitivement pas ce qui lui arrive. De fait, il a, pour la première fois de sa vie d’adulte, l’impression de réaliser à quel point sa marge de manœuvre s’est rétrécie à vue d’œil et que, tôt ou tard, il devra bien finir par rendre les armes, baisser les bras et voir ce qui va se passer.

Cette attente sans but, sans date limite et probablement sans raison d’être, voilà vers quoi il tend, vers quoi tout son corps se braque, sans douleur, sans grimace mais pourtant avec pertes et fracas. Deux semaines à faire vaguement semblant, à sourire sur la photo dérobée par surprise, à surtout ne pas se tromper à l’heure de prononcer son propre prénom.

Alors, en y pensant bien, tout ça ce n’est pas pour lui. La fin du parcours, il l’a connaît déjà mais il ne l’envisage plus telle qu'elle devrait être.

(à finir)

dimanche, mars 05, 2006

Enfin 1

Il ne l’avait pas vraiment voulu. D’ailleurs, s’il on lui avait laissé le choix, il ne l’aurait pas fait ainsi. Mais c’était désormais chose faite. Accomplie, à ranger au bas de la liste des pertes et profits. Il l’était.

Il ne savait pas ce que cela voulait vraiment dire. Il ne savait pas non plus quoi en dire, ni quoi en faire mais il l’était.

Libre, libre, libre.

Enfin.

Avec le monde à portée de mains, avec la tendre sagesse d’un vieux saurien à qui on ne la fait pas mais qui regrette quand même la mâchoire de sa jeunesse, ne serait ce que pour ne faire qu’une bouchée de ce que cette main inconnue lui offre.

Enfin.

Avec la liberté de se laisser aller, de ne plus rien décider, de s’en remettre au destin.

Avec l’envie de n’en découdre qu’avec lui-même, l’envie d’oublier tout ce qui a été appris dans le chagrin.

Avec, pour cette fois, et cette fois seulement, le monde à portée de mains, ce monde qu’on ne connaît que trop bien. Avec la volonté, le désir et surtout le droit de ne plus croire en rien.

Enfin.

Pouvoir se laisser aller, accéder, enfin, librement à ce qui allait le ruiner avant qu’il ne soit trop tard.

Dans un monde que l’on ne connaît que trop bien, sans nulle part où aller si ce n’est au centre d’un cercle tracé à la craie sur le sol, mais il faut croire que ce n’est pas encore assez pour un homme qui osait se croire libre.

Libre aux yeux de tous,
Libre de ne plus y croire,
Libre de ne plus rien dire,
Libre de ne plus rien voir.