dimanche, novembre 13, 2011

Je connais une femme au bord de la mer

Je connais une femme au bord de la mer.
Entre vœu de silence
et nœud de vipère,
comme un moindre mal
qui attend patiemment le voyageur

C'est cette femme qui j'ai choisi de sauver,
elle entre toutes,
parce que ce choix est fait de sel iodé.
Et que l'on ne peut plus sauver aujourd'hui
que ceux et celles
qui se sont déjà sauvé par eux mêmes.

La sauver parce qu'ainsi
c'est l'univers entier
qui tiendrait entre ses mains.

C'est pourtant une femme
qui a jadis chercher à être jugée.
Juchée du haut d'une branche enflammée,
elle regardait au loin
ne reconnaissant plus rien
du paysage de l'enfance,
rasée la tour Galata, pillées les semences de mai.
Ne plus rien reconnaître
mais n'en concevoir aucune amertume.

La vie sectaire
parce qu'écrire revient trop souvent
à recopier le brouillon d'une lettre froissée,
lettre que l'on a jamais envoyée à qui que ce soit.
A une femme au bord de la mer ?
Tout au loin, déjà,
toute une vie à se taire.

Parce qu'ainsi
c'est l'univers entier
qui tiendrait entre ses mains.

C'est peut être par défaut (chanson)

C'est peut être par défaut
que ma vie a été des plus ordinaires
que mes amours ont suivi un cours grégaire
que les gens que j'ai rencontré
n'avaient que des conversations
alimentaires.

Tout est resté comme en en deçà.
Comme une hésitation avant de traverser la rue,
comme le doute avant d'aborder une fille
que je n'avais jamais vu.

Tout est resté sous la coupe d'un piège.
Il n'y a pas eu d'épiphanie
sous un arbre du Parc Monceau.
Il n'y a pas eu non plus de souffle glacé
alors que j'étais nu dehors.

C'est peut être un défaut
que de regarder sa vie tout en la surplombant.
C'est peut être un défaut
de préférer le poids au sursaut.
C'est peut être un défaut
mais il n'est pas encore temps de s'en blâmer.

Impressions d'Afrique

L'armistice n'a duré qu'un temps.

J'imaginais l'univers comme un revers de main,
un soufflet asséné aux certitudes,
comme l'iceberg qui court à sa perte
avec la lumière qui ne se lasse pas de raconter
ce qui se se distingue à peine.

Quelque chose sonne faux
la viande salement apprêtée
pour une cérémonie de mariage.
Où sont mes instruments?
Quid du piano à queue?
Toute ma vie a raisonné dans l'éclatement d'une bulle de savon.

Le poids de l'eau a repris son cours.
Il n'y a pas un seul mot pour le dire.
La nuit qui me réveille,
le souvenir d'une longue et unique journée
où le soleil n'a eu cesse de chauffer à blanc,
les blancs si maladroits, les silences dans les conversations.

Le front s'est institué,
la guerre a été déclarée
au réveil nous sommes ennemis,
plus besoin de parloter,
plus d'éléphants à aller chasser.

Là où la lune s’appuie
pour que l'un de nous deux soit absent
toute la pluie a dû être tamisée.

La caresse ne viendra qu'après la noyade.

Le ciel est de nouveau à vif

Le ciel est de nouveau à vif

C’est cette angoisse qui se dessine et qui nous laisse sans voix.
Du coin de notre rue,
jusqu’à l’horizon que je te destinais.

Car il n’y a pas de douleur sans voix,
pas de vie qui ne s’achève ici.
C’est le monde qui pense pour le monde,
un tremblement a suffi à le réveiller,
un mouvement à le dénouer.

Ramassée sur elle-même,
étendue sur le sol,
elle a attendu que le soleil se lève
pour se mettre à pleurer.

Le silence de la mer

Le silence de la mer

J'ai beau eu m'y efforcer
esquiver les lignes droites,
longer les avenues fleuries
et détourner tous les avions possibles.
Rien n'a eu de cesse que de me ramener au silence de la mer.

Tu as beau essayer,
tricher avec les heures,
te soustraire aux sourires figés
et affranchir les esclaves encore debouts.
Rien n'a eu de cesse que de te ramener au silence de la mer.


Prends garde à l'ancien,
il déshéritera ta jeunesse.
Sois effrayée par le froid,
il ne te réchauffera qu'une fois sous terre.
Crains le temps de l'éclipse,
il n'aura de cesse que d'illuminer ton absence.
Toutes ces choses qui
n'ont rien à voir avec le silence de la mer.

mardi, novembre 01, 2011

Les yeux

Les yeux éblouis, comme rougis
qui se refusent à l'évidence,
à la stérilité de la situation.

Les yeux qui se perdent
sur le socle d'une statue,
la pause d'un vague César,
l'achèvement de toute une vie.

Les yeux qui engrangent
une file d'images surexposées,
une fille, une créature dérangée.

Et les yeux qui se refusent
qui ne se couchent pas le premier soir
qui se réservent pour la suite
l'achèvement de toute une nuit.

Les yeux attendus
à la porte d'une révélation,
à l'orée d'un envol d'oies sauvages.

Les yeux, les cils, le masque d'une nuit,
l'absence de sens aussi,
les yeux qui cherchent à se voir.

Le désir qui va de soi

Le désir qui va de soi

Comment m'as tu appelé ?
Daniel ?
Ne sais tu donc pas que ce prénom,
ce prénom que tu supposes être mien,
n'appartient qu'à ceux que j'ai fuit ?

Des jours et des semaines à me baisser
à ramasser les restes de ton festin
ta beauté délaissée, tes mains encore souillées
Sans effort et sans dire merci,
j'ai été béni.

Alors ce soir oublie ce prénom
ces lettres qui une fois assemblées
ressemblent plus à un rictus
qu'à une appellation désirée.

Le désir a beau être forcené,
il finit par ne plus ressembler à rien,
pas à l'image,
en tous cas,
d'un couple lové autour de son passé.

Ce Daniel n'a plus de désir.
Il ne veut plus être jugé par Dieu.
Ça va de soi.

L'enjeu

Se croire vivant
sans avoir lutté pour cela.
Éteindre le ciel
et s'en sortir gagnant.
Le jeu a assez duré comme cela
l'enjeu n'est pas de durer.

Rendre grâce à la mémoire,
ce long fil dénoué
qui mène à aujourd'hui.
Cette longue litanie,
de pleurs encouragés.
L'enjeu n'est pas de durer.

Ensevelir sa crainte et forcer le silence
car qui brise la Loi
se verra récompensé.
Et qui cherche, finira par trouver.
Et qui frappe à la porte, finira par rentrer.

L'enjeu n'est pas de durer.

Solaris

Solaris

Dans ce temps d'océans incertains,
dans cette page de réflexions biaisées,
je recherche un souvenir
non pas un parfum qui tiendrait debout,
porté par des jambes qui poussent un soupir
mais
bien, plutôt,
un souvenir que l'on tend à repriser
à chaque fois qu'il s'étend sur la table,
comme un animal qui se love,
un drap de sensations si souvent tâchées
que l'on se demande
à qui est ce sang ?
à qui appartiennent ces sanglots ?
Et la réponse n'en est que plus simple.

A cette femme qui se tenait là.
A la princesse que l'on a vite rendu à la morgue
A cette femme qui aimait la vie qu'elle aurait aimé avoir.

Dans ce temps d'océans incertains,
le bruit du ressac joue avec les souvenirs
comme l'embrun avec les algues brunes.
C'est là et ce n'est pas là,
ce parfum n'a jamais été le sien.
A qui appartient ce sang ?
A qui ces sanglots ?
Et la réponse n'en est que plus simple,
Solaris.

Ô douce lumière

Ô douce lumière, ô vilain rictus
viens m'illuminer une dernière fois
que chacun sache enfin
à qui il a affaire.

Que les femmes se détournent de moi
que les enfants embrassent la Foi
Et que l'on cesse de se souvenir de moi.

Tant d'années à ne demander que ça
qu'un long soupir s'écoule tout autour de mon nom,
tant de temps passé à attendre ce qui a déjà eu lieu.

Et aujourd'hui que la lumière se fait rare
que le souvenir se dérobe sous ma voix
que chacun pense enfin à m'oublier.