mardi, février 25, 2025

Lac

 

Aujourd'hui, je suis à la merci de ce fantôme que tu connais si bien.


Non, non. Ce n'est pas cela que je voulais dire. Je ne voulais pas commencer comme ça. Attends. Tu ne vas rien comprendre. Et il faut que tu me comprennes à tout prix. Voilà. En fait, je voulais te parler du temps des fantômes, c'est ça, la façon que nous avons d'essayer d'exister, de nous repérer. Il n'y a plus de dates ou d'années. Cela ne marche pas comme ça. La meilleure image qui me vient à l'esprit et ce n'est même pas exactement ça, c'est les matriochkas.

Les faits s'entassent, s'imbriquent les uns aux autres. Ils ont la même forme mais pas la même taille. C'est la taille qui nous permet de nous repérer dans le temps. L'unité de mesure étant l'intensité de l'émotion.


Par exemple. Je te tiens par la main.


Ah non, pardon. Je me suis encore trompé. J'ai cru que c'était réel. C'est l'émotion d'un fantôme. Je reprends. Je cherche les mots. Je crois que je suis avec toi. Il me semble que je te tiens la main.


Cela ressemble à un lac en altitude. Nous sommes déjà venus ici car nous n'avons pas de difficulté à savoir quel est le chemin le plus court qui mène à notre destination. Je n'arrive pas à savoir d'où nous venons mais l'important c'est que nous sommes arrivés. Nous regardons la surface de l'eau un long moment car nous savons très exactement qu'ils vont venir. Les fantômes de nos émotions, chacun avec un son qui lui est propre, une forme, une couleur, presque même une odeur. Le bleu est salé, le rouge plutôt sucré,etc. Le lac se transforme peu à peu puis cela va très vite. De la surface du lac, des gouttes d'eau remontent de plus en plus vite jusqu'à nos yeux. Et les noms reviennent à notre mémoire. Ton nom, mon nom. L'intensité est forte. Toi tu as ton souvenir, moi le le souvenir du mien. Il nous en a fallu bien du temps avant de savoir quel fantôme nous accompagnerait jusqu'à la fin de notre vie. Tout a le goût de ces larmes que nous devons accepter. C'est l'humiliation ou la séparation, le bleu ou le rouge.


A cet instant, ce vaste lac en altitude dont nous sommes les deux seules sources.

samedi, février 22, 2025

Je définis un rêve transparent.

 

Bien au dessus de la surface,

et dans la distance d'une constante indécision,

Je définis un rêve transparent.


Il me faut,

une atmosphère dépourvue d'oxygène,

des pilules de plasticine à portée de main

mais surtout un collier d'airain.


Une figure prend forme,

c'est un vieux portrait sans relief animé.

Un ami sans attache et sans renom.

De retour, à l'improviste,

sur le pas de la porte,

encore en avance sur l'heure annoncée.

Il ouvre la bouche pour respirer.

Tout barbouillé de rouge,

et pourtant ne sachant pas saigner,

c'est un invité, c'est un fantôme adoré.


Encore le lever d'un soleil,

le matin toujours,

après avoir été transparent,

tout une nuit durant,

c'est tout barbouillé de rouge,

qu'il m'apprend à faire semblant.


Qui a dit que les fantômes n'aiment pas être hantés?

Parce que je me suis donné à ce qui aime être regardé,

je ne dois pas oublier d'être oublié.


A force d'être transparent, le rêve devient tranchant,

un soupir, un glissement, un autre soupir.

C'est juste un instant qui ne dure pas vraiment.

vendredi, février 07, 2025

Avec toi

 

Avec toi

et non plus,

tout autour de toi.


Avec toi

et non plus,

bien après toi.


Ce que je veux. Ce que je mérite.


C'est un pas en avance

sur ce que retarde l'horizon.

Un pas en retard

sur ce qu'annonce la raison.

Fini d'être un souvenir.


Si je ferme consciencieusement les yeux

je te vois enfin.

Quelle joie de te retrouver!


Tu es tellement toi même

que les mots ne cessent de trébucher,

à chaque marche qui mène

d'un fantôme à sa muse.


C'est si long de se retrouver.

Si long de ne plus se détester.

Tu vois?


Il a même fallu que je disparaisse complètement.


Avec toi

et non plus,

tout autour de toi.


Avec toi

et non plus,

bien après toi.


Ce que je veux. Ce que je mérite.


C'est le goût des épines sur mon front sans doute.