mercredi, novembre 15, 2006

Vie Immédiate -8-

Vie Immédiate, vie délayée dans un temps où l’amour n’a été qu’un prête - nom.

Pourquoi l’écrire ?
Pourquoi le dire ?
Parce qu’on le ressent comme l’évidence même, tout simplement.

Au-delà de ce qui a été dit et de ce qui reste à vivre, on peut toujours essayer de garder en soi la conviction profonde que tout n’est pas encore joué, dans l’instant, dans cet immédiat dont tout le monde se gargarise ; pour celui qui garde en lui, précieusement et aujourd’hui presque oubliés, toute une collection de souvenirs aigre-doux, quels leviers actionner ? Quels fils divins dévider ? Maintenant.

Loin de se cacher à l’intérieur d’un mensonge, loin de se résigner à ne vivre qu’au sein d’un pétale de moments congelés, il voudrait s’ouvrir, inventer de nouveaux réflexes. Echapper à la parenthèse qu’il semble avoir adopté définitivement.

Vie Immédiate qui ne donne pas son véritable nom au premier rendez vous, ni au second, ni jamais, je crois.

Elle, pourtant, je l’imagine élancée, fine et brune. Vie Immédiate, elle, elle seule et pas une autre. Une rencontre pareille à nulle autre. Mais, suis-je à ce point prévisible qu’elle a déjà esquivé toutes mes questions avant même que je n’aie le temps d’ouvrir la bouche ? Suis-je si lent qu’elle a déjà esquissé un mouvement de fuite alors que j’en suis encore à me demander si je l’enlacerai à la taille ou aux épaules ? Prévisible car humain dans son immobilité la plus simple, lent car désireux de s’oublier avant même de désirer exister. Un seul constat, l’évidence qui tourne en rond. Il ne me reste plus qu’à inventer la suite. Fuir dans des souvenirs construits de toutes pièces.

Pourtant, c’est une brune qui a grandi, expression concrète et quasi millimétrée de ce qui n’a pas eu lieu, alors … C’est sans doute à ça que servent les rêves, à combler les vides, à satisfaire les plaisirs ô combien inexistants, et pourtant … Elle existe. Elle, creusant inexorablement la même faille, jouant au passe muraille avec une histoire qui n’aurait pas eu lieu. Du moins pas tant que je ne me décide à en décliner les méandres.

Difficile de la reconnaître tant que l’on s’obstinera à garder les yeux ouverts. Quand bien même elle n’aurait pas de raison d’être, elle sera là, pimpante comme au premier jour, effarouchée de tout ce pouvoir qu’elle a sur moi. Prête à tout pour vivre avec moi dans ce monde où les escargots grimpent au plafond par ennui et où les papillons s’accordent à danser sur une musique glaciale.

Ne me demandez pas de vous en dire plus, tout ce que je sais c’est qu’un jour cette fille existera telle que je vous la décris aujourd’hui. Pure, raide dingue, gracieuse funambule sur sa belle béquille, vierge aussi puissante que redoutée. Comment échapper à cette certitude qui n’a pas encore eu le temps d’être ?

L’idée n’est plus et s’évapore. Tout redevient possible. On vit, on meurt, on ferait bien d’y prêter un peu plus d’attention à cette phrase : « tout redevient possible » et on ferait mieux d’y croire une bonne fois pour toutes, Vie Immédiate ou pas. Flamboyante et ultime tout comme cette vision d’un au-delà de carton pâte. Pourtant, elle s’est parfois rendu là où il n’y avait rien, elle a ce pouvoir mais ne sait qu’en faire. Délicieuse et troublante, elle sait que cela ne sert absolument à rien car l’illusion l’abandonne à nouveau, sans crier gare.

La Vie Immédiate, telle que je l’ai un jour refusé, toujours et encore toi, prête à te jouer de nous tous, de te moquer de moi à l’occasion ; flamboyante et ultime, tout comme elle qui hélas ne le sait pas.