jeudi, juin 02, 2011

Les mains pleines, les mains vides

Les mains pleines, les mains vides

« Ce que j’ai entre les mains, je n’en ai jamais voulu.

Autant se les couper une bonne fois pour toutes
», se dit il.

Des années entières à tenter de comprendre du bout des doigts ce que l’intellect se refuse à comprendre. De si longues soirées à triturer ses doigts comme d’autres pressent le jus d’un citron.

Il en ressort que je suis encore là à écouter un énième disque que je connais par cœur. A rêvasser, encore et encore sur un accord mineur auquel on ne s’attendait pas, ou bien sur une fausse note qui sonne pourtant si juste.

L’image était séduisante. Une fausse note qui sonne juste comme la voix de ce chanteur chantre de Noam Chomsky. Comme une image de l’Ancien Testament, le temps où sous la tente, en fuite ou en exil, un peuple écrivait sans relâche les métaphores d’une civilisation en devenir.

Ce que prend la main est un sable qui n’a qu’un désir, s’écouler lentement entre les doigts et rejoindre son lit minéral. On peut supposer qu’il ne peut pas en être autrement, telle est la loi de la nature. Ce rêve de garder un jour ce sable indéfiniment, d’accorder sa voix discordante à une partition vieille de plus de trois mille ans. Une main qui se rêve pleine alors qu’elle est tout simplement vide.

Car ce qu’il n’avait jamais voulu, voilà ce qu’il tenait aujourd’hui dans ses mains.