samedi, mars 01, 2008

UNTITLED Janvier 1979

UNTITLED Janvier 1979

(brouillon de lettre de Jasamine)

Tu m’avais pourtant promis que la fin n’en serait pas une. Que la séparation était notre seule chance de nous retrouver un jour. Un coup de couteau dans le dos et dans le noir ne te suffisait donc pas. Ne me dis pas aujourd’hui que nous sommes devenus invisibles l’un à l’autre. Ne me dis pas ça, ça fait trop mal. Pour reprendre une des expressions favorites de ton pote Harvey « l’amour a encore frappé à la mauvaise porte ». Oui, c’est sans doute ça. Ce serait tellement facile de s’en convaincre et de se satisfaire de ce genre d’approximation facile. Tellement facile que ça y est, c’est trop tard. Nous sommes invisibles.

L’absolu dont tu parlais si souvent, n’en était pas un ; d’absolu, il ne reste rien, même pas un regret, juste assez d’encre pour continuer à écrire, toi aussi, qui parlais tant d’écrire un jour, sur tes voyages, sur ton obsession des bagnoles. Aucun absolu en vue. J’ai beau regarder au loin, fixer un point le temps qu’il faudra, rien ne vient. Pipeau. Fausse donne. Les dés sont pipés. Je ne sais même pas tricher à ton jeu. Les règles ne ressemblent plus à rien. Honneur aux perdants …Je me rends enfin compte que ton seul goût de l’absolu c’est ton sens du doute. La seule chose dont tu parlais avec conviction c’était ça, tes sempiternels doutes. Rien de plus simple pour saborder un couple que le doute de tout et de son contraire, de moi et de toi, enfin de toi surtout devrais je ajouter … où est passée notre histoire d’amour mon beau Stanley ? Dans le doute, je m’abstiens de croire, tu vois, je fais comme toi maintenant, voilà tout ce que tu m’as légué, le doute, le droit de douter qu’il y a eu un avant et qu’il y aura sans doute un après. Est-ce qu’on appelle ça une dépression ? Je ne sais pas mais cela y ressemble fort.

Si je dois dire aujourd’hui où est passé notre histoire d’amour, je dirais alors qu’elle n’a pas bougé, qu’elle a été et qu’elle reste à tout jamais dans cette boîte où tu étais D.J Je te vois encore, là, en train de me tromper comme le dernier nigaud qui s’ignore complètement, qui me fait du mal parce qu’il ne sait plus comment communiquer autrement avec moi. Alors pourquoi s’effondrer, ici et nulle part, ailleurs mais toujours au centre de toutes choses ?

Que reste-t-il ? De la bile plein les lèvres, ivresse de l’inabouti, le gout de tes larmes dans ma bouche, ce qui revient au même. A l’endroit où tu te trouvais, il ne me reste plus que ça, la mélodie du doute.

Bref. Tout est fini, encore une fois je doute que cette lettre ne reste à l’état de brouillon, c’est bien la deuxième que j’écris pour te demander de m’oublier car je sais que tu penses à moi mais pourquoi me détruire à nouveau si je sais désormais que tu ne m’aimes plus ? Pardonne moi d’avance si je n’ai pas su utiliser avec autant de dextérité que toi les mots « toujours » et « absolu » mais bon, le cœur y était. Je ne veux pas te mentir. C’est tout. Laisse-moi être libre. Ne me permets pas le luxe de devenir un fantôme. Je suis celle qui sait qu’elle va avancer et qui ne se soucie plus que tu te mettes à couler.

Jasamine.


d'après une chanson de David Bowie.